Le gouvernement grec a du faire marche arrière. Sous la pression des associations, il a du geler un projet de loi réformant la loi littoral locale, menaçant selon ses opposants, les côtes grecques. Le projet prévoyait notamment de supprimer les freins à la construction sur les plages et à l'exploitation de la côte.
La proposition du gouvernement avait pour but de «promouvoir un style d'exploitation du littoral de type espagnol», résume le journaliste Periclès Vassilopoulos à popos de la loi qu'a tenté, en vain, de faire passer le gouvernement. Il est vrai que le bétonnage de la Costa Brava n'est pas un exemple enthousiasmant pour la Grêce et ses 16.000 km de côtes méditerranéennes.
Cette loi que le gouvernement avait décidé de mettre sur la table de l'Assemblée affirmait «simplifier» les dispositions existantes. «Dans sa forme actuelle , le projet de loi supprime toutes les restrictions existantes sur la superficie maximale désignée pour les concessions de plage comme des bars, des parasols et des chaises longues tout en levant le droit de libre accès à la côte pour le public. Les mesures proposées visent également à faciliter des constructions permanentes sur les plages à des fins commerciales, tout en permettant aux entreprises de payer des amendes pour légaliser des constructions non autorisées», détaillait le journal grec Ekathimerini.
«une jungle de béton infini de Benidorm privés»
Rendu public mi-avril, le texte proposé par le ministère des Finances (et non celui de l'environnement) mettait en avant «l'immense importance économique de la zone côtière» en Grèce. Il proposait de «libérer cet énorme potentiel de croissance» en «simplifiant» les procédures «inefficaces et bureaucratiques». Bref, le gouvernement, toujours aux abois financièrement, tentait de rentabiliser un peu plus le littoral.
Le projet a immédiatement soulevé une tempête. Une pétition en ligne a recueilli 160.000 signatures : «La côte grecque largement intacte et vierge va-t-elle devenir une jungle de béton infini de Benidorm privés. Au nom du «développement» et «progrès» le dernier bastion des côtes publiques en Europe sera donné aux développeurs qui seront autorisés à les clôturer et vous faire payer pour la destruction qu'ils provoquent», affirme-t-elle. Les réseaux sociaux ont relayé les critiques et de grandes organisations internationales de défense de l'environnement ont embrayé...Ainsi le WWF a indiqué : «Nous essayons de convaincre les députés que cette loi détruit le potentiel touristique de la Grèce, au lieu de le promouvoir (...). Les étrangers qui viennent en Grèce ne veulent pas voir des plages détruites et du béton partout mais notre vraie richesse naturelle»,
Plus ennuyeux pour le gouvernement, qui vient de subir une défaite cuisante aux Européennes, les critiques sont venues aussi de sa propre majorité. Des socialistes du Pasok comme de certains élus de la Nouvelle-Démocratie du premier ministre Samaras. Pour le parti vainqueur des Européennes, Syriza, le projet «engendre une perturbation sans précédent des écosystèmes côtiers et marins, favorise la destruction totale et irréversible du paysage côtier grec unique,hypothèque à long terme le tourisme, abolit le droit des citoyens là l'accès au littoral et favorise la privatisation du littoral»
Il est vrai que la Grèce a su préserver un tourisme individuel ou à taille humaine le long de ses milliers de kilomètres de côtes, dans les îles notamment, même si le mitage et certaines constructions dénaturent là aussi de nombreux paysages. Et que les concessions de parasols et de chaises longues ne sont pas partout du meilleur effet.
«La mer a un pays, la Grèce», disait un ancien slogan du tourisme grec. Il est vrai que le littoral grec (le plus long d'Europe) est encore relativement protégé et que ses merveilles sont infinies. Résultat dans un pays en pleine crise, il était tentant de vouloir rentabiliser à court terme les richesses du littoral grec. Surtout que le tourisme reste une des rares industries qui fonctionne en Grèce, avec une excellente année 2013. Et que la Grèce devrait faire encore «mieux» en 2014 avec 20 millions de touristes attendus. Mais pour le WWF «au lieu d'aller vers une gestion intégrée des zones côtières, la Grèce opte pour une approche fragmentée, superficielle et destructrice de l'environnement, qui finira non seulement par dégrader son patrimoine naturel, mais aussi nuire à son secteur touristique» si cette loi était adoptée.
Plages à vendre
La presse grecque s'est aussi fait l'écho de la mise en vente de plages par l'office de privatisations de l'Etat. Celte privatisation, qui n'a pas de rapport avec le projet de loi inquiète aussi les défenseurs de l'environnement. L'office de privatisations des biens publics grec (HRADF) mettrait en vente quelques unes des plus belles plages du pays.
Ainsi, les plages de la petite île d'Elafonisos au sud du Péloponnèse, classées par plusieurs sites comme les plus belles du pays, seraient mises en vente sur le site de l'Etat grec.
«Comme prévu , la décision du gouvernement de vendre les plages jumelles (d'Elafonisos) - ainsi que 109 autres plages - afin que les entreprises privées puissent avoir des droits d'utilisation exclusive pendant 50 ans a provoqué une controverse majeure», a noté le journal grec To Vima.
«Dans la liste deTAIPED, on trouve les plages de Myrto à Kato en Achaîa, de Vasiliki à Leucade, de Kalmitsi en Chalcidique et - quelle honte - deux plages de Elafonisos, la petite île entre le Péloponnèse et Cythère, célèbre pour ses eaux bleu-vert et la couleur claire de ses plages de sable», précise un site d'information.
Face aux critiques, le fond a indiqué que rien n'était encore décidé. Les précisions de l'office public affirmant qu'il respecterait les lois n'a guère rassuré les élus locaux des sites concernés. De quoi renforcer encore l'inquiétude des Grecs pour la sauvegarde de leur littoral alors que le premier ministre Samaras vient d'annoncer que «nous redémarrons notre pays en commençant par la mer»,